Pour cet article je m’efface pour laisser la parole à Jacques Salomé.
Jacques Salomé a écrit des contes ‘histoires poétiques et ludiques’ afin de les intégrer dans sa pratique de relation d’aide car ils suscitent chez les gens ‘un éveil, une prise de conscience et stimulent les reliances avec leurs histoires personnelles et familiales’.
‘Les contes ont ce pouvoir de toucher en nous plusieurs registres : de stimuler la mémoire de nos oublis, de réactiver notre inconscient, de susciter un autre regard, une autre écoute, d’être porteur d’énergie créatrice’
‘Un conte réveille des forces insoupçonnées, en reliant des vibrations qui se cherchent depuis longtemps vont créer une énergie et parfois un chemin pour atteindre plus d’inaccessible’.
Les contes nous révèlent parfois nos propres aveuglements, nos comportements et conduites les plus aberrants, les plus dérisoires, les plus puérils. Ils deviennent le miroir sans pitié de nos multiples, et attachant personnages.’
Tous ces contes nous racontent une histoire… notre histoire et touchent une part de nous-mêmes. Ce livre est à offrir aux parents pour faire la lecture à leurs enfants et leur permettre de s'exprimer et d'échanger. Je vous en livre le conte de…
LE CONTE DE LA BÉQUILLE QUI SE DÉSESPÉRERAIT DE N’AVOIR PLUS PERSONNE A SOUTENIR
Il était une fois une béquille qui avait beaucoup servi. Le nombre de personnes qu’elle avait servi était impressionnant. Elle avait passé l’essentiel de sa vie à ça.
Aujourd’hui elle terminait tristement sa vie, dans une chapelle pleine d’ex votos et elle hurlait une plainte intérieure, interminable, à l’idée de passer sa vie clouée sur un mur. Elle qui avait tant voyagé, aidé de gens. Elle se sentait humiliée, inutile et s’interrogeait sur l’ingratitude des humains, sur le sens de sa vie. Elle avait tant fait pour lui et dès qu’il avait été guéri il l’avait accroché au mur de l’église pour remercier son Dieu !
Ce jour-là alors que toutes ces idées tournaient dans sa tête un vieux monsieur était entré par curiosité dans la chapelle. Absorbé par la contemplation de tous ces remerciements accrochés au mur il s’approcha de la béquille. Le monsieur levait la tête afin d’admirer une rosace, la béquille eu alors une idée de génie qui la mit en joie, ce qui la fit décrocher du mur et tombée aux pieds du vieux monsieur. Il trébucha et tomba lourdement et se cassa non seulement une jambe mais également l’épaule…
Étendu sur le dos il se mit à gémir. La béquille jubilait et se disait ‘enfin quelqu’un à aider, à soutenir, à accompagner, à protéger !’.
Le monsieur souffrait terriblement et se lamentait :
‘Que vais-je devenir tout seul dans cette chapelle ? Personne ne vient jamais ici, mais pourquoi je suis venu ici ? Je n’aurais jamais du voyager seul !’ Il se sentait prêt à accuser le monde entier.
De son côté la béquille toute proche murmurait
‘Je suis là, je suis là, je suis prête à vous aider !’
Dans un premier temps il ne l’entendit, il préférait s’injurier, injurier le monde entier, la vie ‘de ce malheur injuste qui lui tombait dessus’
La béquille implorante, suppliante, câline, susurra ‘Regardez-moi, prenez moi, je suis là, je peux vous aider, vous verrez, ça ira mieux…’
Le monsieur essaya de se révéla mais hurla de douleur, il tâtonna et sa main tremblante découvrit la béquille toute prête à servir, pleine de son désir de lui être utile, toute abandonnée à sa volonté de l’aider à tout prix…
Quel soulagement pour chacun ! Ils se rencontrèrent enfin, s’étreignirent longuement. Une émotion immense les envahit tous les deux. Tout ce chemin parcouru en aveugle, tant d’obstacles traversés pour arriver enfin l’un à l’autre. La béquille se fit aussitôt le serment secret ‘ah celui-là, je ne vais pas le lâcher de sitôt’. Ils quittèrent la chapelle l’un soulagé presque heureuxet l’autre apaisée resplendissante de bonheur.
C’est ainsi que des béquilles ingénieuses s’arrangent pour s’attacher à quelqu’un en bonne santé en se rendant ABSOLUMENT INDISPENSABLES ! Et se débrouillent pour ne plus le quitter…
A bon entendeur salut !